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Code
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Ordre

 


Article 83
Rédaction d'un contrat
(article R.4127-83 du code de la santé publique)

Conformément à l'article L.462 du code de la santé publique (devenus : art. L.4113-9, L.4113-10, L.4163-10 dans la nouvelle codification du code de la santé publique), l'exercice habituel de la médecine, sous quelque forme que ce soit, au sein d'une entreprise, d'une collectivité ou d'une institution ressortissant au droit privé doit, dans tous les cas, faire l'objet d'un contrat écrit.
Ce contrat définit les obligations respectives des parties et doit préciser les moyens permettant aux médecins de respecter les dispositions du présent code.
Tout projet de contrat peut être communiqué au conseil départemental de l'ordre, qui doit faire connaître ses observations dans le délai d'un mois.
Toute convention ou renouvellement de convention avec un des organismes prévus au premier alinéa, en vue de l'exercice de la médecine, doit être communiqué au conseil départemental intéressé, de même que les avenants et règlements intérieurs lorsque le contrat y fait référence. Celui-ci vérifie sa conformité avec les prescriptions du présent code ainsi que, s'il en existe, avec les clauses essentielles des contrats-types établis soit par un accord entre le conseil national et les collectivités ou institutions intéressées, soit conformément aux dispositions législatives ou réglementaires.
Le médecin doit signer et remettre au conseil départemental une déclaration aux termes de laquelle il affirmera sur l'honneur qu'il n'a passé aucune contre-lettre ou avenant relatifs au contrat soumis à l'examen du conseil.

Commentaires

L'exercice de la profession médicale conduit souvent les médecins à passer des contrats, soit avec d'autres médecins, soit avec des tiers, contrats d'exercice en commun, en association ou en société- contrat de location d'immeubles ou de matériels- contrats d'exercice en clinique- contrat d'engagement dans des établissements publics ou privés - contrats de remplacement - contrats de cession de cabinet, et beaucoup d'autres...

En application du principe de la liberté des conventions, ces contrats sont conclus librement sans besoin d'autorisation et, sous réserve de ne pas contrevenir à l'ordre public, leur contenu est librement déterminé par les parties signataires qui sont tenues d'en respecter les stipulations.

Toutefois l'Ordre qui a pour mission aux termes de l' article L.4121-2 du code de la santé publique (ancien art. L.382) de "veiller à l'observation par tous les médecins de leurs devoirs professionnels ainsi que des règles édictées par le code de déontologie", ne peut se dispenser d'exercer sur tous ces contrats non seulement un droit de regard mais aussi un certain contrôle.

C'est ce qu'a prévu le législateur en instituant aux articles L. 4113-9 à L.4113-12 du code de la santé publique (anciens art. L.462 à L.464) un régime de communication des contrats à l'Ordre avec possibilité de certaines interventions de sa part en vue de concilier au mieux le respect de la liberté contractuelle avec les impératifs d'un contrôle déontologique.

L' article L.4113-9 (ancien art. L.462) a donc d'abord spécifié que tous les contrats et avenants intervenant à l'occasion de l'exercice de la profession devaient nécessairement être passés par écrit, puis posé le principe de leur communication obligatoire aux conseils départementaux de l'Ordre. Il a enfin prévu des sanctions à l'encontre des médecins qui s'en abstiendraient (refus d'inscription ou poursuites disciplinaires) ainsi que des tiers qui s'y opposeraient (amende pénale).

Les contrats et avenants doivent être communiqués lors de la demande d'inscription au tableau (contrat à annexer à la demande) ou à tout moment en cours d'exercice, dans le mois suivant leur conclusion.

Les médecins ont également la possibilité d'anticiper cette communication en soumettant à l'avis du conseil départemental un contrat encore à l'état de projet (art. L.4113-12, ancien art. L. 464).

Les vérifications à opérer portent, sans que soit perdu de vue le principe fondamental de la liberté contractuelle qui fait la loi des parties, sur la conformité déontologique des stipulations du contrat en cause, au regard notamment du respect de la liberté d'exercice et de l'indépendance professionnelle ainsi que des principes du libre choix, de la liberté d'installation et de prescription, du secret professionnel et du paiement direct, sur sa validité juridique (absence de clauses contraires à l'ordre public et à la loi), sur sa cohérence interne (clauses obscures, contradictoires, mal rédigées) et enfin sur son opportunité au regard du bon exercice de la profession (clauses léonines ou potentiellement conflictuelles).

L'examen auquel doit procéder le conseil départemental est enfermé dans des délais : un mois s'il s'agit d'un projet (art. L.4113-12, ancien art. L. 464), six mois pour les contrats déjà signés (art. L.4113-10, ancien art. L. 462).

L'expiration de ces délais a pour seul effet d'interdire la mise en oeuvre de poursuites disciplinaires en cas de clauses antidéontologiques. Elle ne dessaisit nullement le conseil de ses pouvoirs de mise en garde ou d'injonction et ne vaut pas approbation tacite du contrat en cause.

En règle générale l'Ordre n'a aucun pouvoir d'approbation. Le contrat est valable de par la signature des parties, indépendamment des observations qu'il peut être amené à formuler et seule l'autorité judiciaire peut en prononcer l'annulation.

Les observations du conseil départemental ne constituent qu'un avis qui toutefois, par exception aux principes généraux du contentieux administratif, est regardé, lorqu'il est négatif, comme faisant grief et pouvant faire l'objet d'un recours devant le Conseil national, puis d'un pourvoi devant le Conseil d'Etat (voir note 1).

Dans trois cas particuliers le conseil de l'Ordre dispose de pouvoirs supplémentaires :
a) lorsque le contrat accompagne une demande d'inscription au tableau, la présence de clauses antidéontologiques peut justifier un refus d'inscription ;

b) il en va de même s'il s'agit d'un contrat instituant une société civile professionnelle (SCP) ou une société d'exercice libéral (SEL) car la reconnaissance par le conseil de la régularité déontologique des statuts est une condition à l'inscription de ces sociétés ;

c ) si les parties ont elles-mêmes subordonné l'entrée en vigueur du contrat à l'approbation de l'Ordre.

C'est dans le cadre de ce régime général défini par la loi et applicable à tous les contrats ayant pour objet l'exercice de la profession médicale que s'insèrent trois des articles du code de déontologie respectivement consacrés à certains d'entre eux parmi les plus usuels, qui viennent sur le plan réglementaire compléter et adapter à leurs cas particuliers les règles du code de la santé publique :

- l'article 83 (ancien article 77) concerne les contrats intervenant entre médecins et entreprises ou établissements de droit privé ;

- l'article 84 (ancien article 78) a trait aux contrats conclus entre médecins et administrations publiques ;

- l'article 91 (ancien article 71) régit les contrats passés par les médecins entre eux ou avec d'autres professionnels de la santé.

Ces trois articles figuraient déjà dans les versions précédentes du code mais dans un ordre différent, celui concernant les contrats entre médecins venant en tête et les deux autres, régissant les contrats passés par les médecins avec des entreprises privées ou des administrations publiques, étant placés plus loin parmi les articles consacrés à l'exercice salarié de la médecine.

La nouvelle présentation, introduite par le Conseil d'Etat, a sa logique propre. Elle bouscule les habitudes mais ne modifie pas le fond des choses.

L'article 83 est maintenant le premier article de cette triade. Il a donc trait aux conventions qui lient les médecins à des entreprises, collectivités ou institutions ressortissant au droit privé.

Son champ d'application est très large. Il spécifie lui-même qu'il vise tous les contrats passés avec ces diverses personnes morales "sous quelque forme que ce soit" et ne figure plus, comme c'était le cas auparavant, parmi les dispositions propres à l'exercice salarié de la médecine, ce qui implique qu'il s'applique aussi aux contrats comportant pour le médecin signataire un autre mode de rémunération, comme c'est le cas notamment pour les conventions passées entre praticiens et cliniques privées.

Quant à la liste des entreprises, collectivités et institutions ressortissant au droit privé, elle est très étendue et recouvre tout ce qui n'est pas couvert par celle, au contraire limitative, des administrations publiques et collectivités administratives visées à l'article 84.

C'est ainsi qu'elle inclut notamment les associations et fondations reconnues d'utilité publique, les établissements privés à but non lucratif ou participant à l'exercice d'un service public, hospitalier, pénitentiaire ou autre, les syndicats, les mutuelles, les caisses de sécurité sociale à l'exception des caisses nationales qui ont le statut d'établissement public, les sociétés nationales et entreprises publiques non érigées en établissements publics.

Tous ces contrats doivent obligatoirement être passés par écrit.

Leur contenu doit être suffisamment substantiel. Ils doivent définir les droits et obligations réciproques des parties et préciser les moyens mis en oeuvre pour assurer le respect des règles de déontologie, notamment en ce qui concerne l'indépendance des médecins et le secret professionnel.

C'est là une disposition qui ne figurait pas dans l'ancien article 77 et qu'a retenue la nouvelle rédaction de l'article 83 en s'inspirant de la jurisprudence du Conseil d'Etat selon laquelle il ne suffit pas de stipuler que le médecin exercera ses fonctions conformément au code de déontologie et que les parties prendront toutes mesures utiles afin que soient assurés le secret médical et l'indépendance technique du praticien. Il faut aussi préciser la nature des mesures ainsi envisagées et le contenu des engagements pris par les parties (voir note 2).

Il est précisé en outre, et c'est encore une disposition qui ne figurait pas dans l'ancien article 77, que cette obligation de communication porte non seulement sur le contrat mais aussi sur les avenants et sur les règlements intérieurs auxquels il est fait référence. Il est rappelé aussi que les médecins doivent, lors de la communication de leur contrat, déclarer sur l'honneur qu'ils n'ont pas passé à leur propos de contre-lettre.

Pour tous ces contrats le code de déontologie rappelle les règles que pose l' article L.4113 du code de la santé publique (ancien art. L.462) et notamment l'obligation d'une communication à l'Ordre, avec la possibilité, particulièrement recommandable, d'une présentation de ce contrat à l'état de projet, ce qui a l'avantage de permettre au médecin concerné de tenir compte, avant de signer, des observations ordinales.

Cette communication doit être faite au conseil départemental au tableau duquel est inscrit ou demande à s'inscrire le médecin signataire. C'est à ce conseil qu'il appartient d'étudier le contrat, avenant ou projet qui lui est soumis, de procéder aux vérifications portant, comme il a été indiqué ci-dessus, sur la conformité déontologique de leurs stipulations, leur validité juridique et même leur opportunité au regard du bon exercice de la profession, enfin de formuler les observations qui découlent de cet examen et qui peuvent aller jusqu'à l'émission d'un avis partiellement ou entièrement défavorable.

Dans l'accomplissement de cette tâche, qui peut se révéler très difficile- tant sont diverses les situations particulières et tant sont grandes les ressources imaginatives, parfois perverses, des médecins et surtout de leurs conseils juridiques- les conseils départementaux peuvent trouver une aide dans la consultation du Conseil national en soumettant à sa commission des contrats les problèmes qui les déconcertent ou les embarrassent. Mais l'avis du Conseil national ne se substitue pas à celui du conseil départemental qui en est le seul destinataire et qui demeure le seul interlocuteur du médecin qui l'a saisi.

L'article 83 rappelle enfin que la mission de contrôle impartie au conseil départemental porte essentiellement sur la conformité des articles des contrats qui lui sont soumis aux principes formulés dans le code de déontologie, en ajoutant, ce que la loi ne disait pas, que cette conformité doit être vérifiée également par rapport, s'il en existe, aux clauses essentielles des contrats-types établis et adoptés par le Conseil national. C'est là, venant du code de déontologie qui n'est, on le rappelle, qu'un règlement et non un texte législatif, un apport original et considérable à la théorie des contrats médicaux.

Il faut y voir d'abord une invitation faite à l'Ordre d'établir des contrats-types dans les domaines visés par l'article 83. Ces contrats-types sont au départ des modèles de contrats élaborés par les instances de l'Ordre en accord avec l'établissement ou l'institution concerné : syndicat, association, fondation, établissement d'utilité publique etc. dans le strict respect des règles de la déontologie. Ils sont proposés et non imposés aux médecins désireux de contracter et il leur est recommandé de s'en inspirer.

Mais, et c'est là un point fondamental, l' article 83 autorise l'Ordre à présenter certaines clauses de ces contrats-types comme essentielles et déclare qu'elles auront valeur réglementaire.

Ce ne sont plus de simples propositions que les médecins sont libres de ne pas suivre, ce sont, comme les articles du code de déontologie lui-même, de véritables dispositions réglementaires qu'ils sont tenus d'observer.

L'existence, tout à fait exorbitante, de ce pouvoir réglementaire confié à l'Ordre a été rappelée et confirmée par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 13 mai 1987 (voir note 3).

La constatation du caractère réglementaire de ces clauses essentielles des contrats-types entraîne comme conséquence, à côté de leur caractère obligatoire, leur soumission, comme toute disposition réglementaire au contrôle de légalité du Conseil d'Etat par la voie du recours pour excès de pouvoir et par celle de l'exception d'illégalité qui peut s'exercer sans condition de délai.

Ce contrôle conduit le Conseil d'Etat à annuler ou à déclarer illégales et sans effet les clauses qui ne répondent pas aux exigences de légalité qu'il définit lui-même et qui sont notamment, en vertu de la jurisprudence précitée :

- de ne pas être contraires à la loi,
- de ne pas imposer une obligation qui ne peut être instituée que par le législateur,
- de ne pas porter une atteinte grave à la liberté contractuelle,
- et surtout de n'imposer que ce que justifient le respect du code de déontologie ou les exigences propres de l'exercice de la profession médicale.

Le caractère très rigoureux de ce contrôle de légalité exercé par le Conseil d'Etat a rendu le Conseil national assez circonspect dans l'usage du pouvoir réglementaire qui lui est ainsi conféré (voir note 4). Enfin les moyens d'action des conseils départementaux sont, comme on l'a vu, assez limités.

Ils n'ont pas de pouvoir d'approbation. Mais ils peuvent refuser d'inscrire un médecin qui aurait contracté des engagements incompatibles avec les règles de la profession ou de nature à le priver de l'indépendance professionnelle nécessaire. Et si le contrat est communiqué par un médecin déjà inscrit au tableau, ils peuvent donner un avis défavorable à tout ou partie de ce contrat et enjoindre au médecin concerné d'en provoquer la modification ou la suppression, au risque, d'être déféré devant la juridiction ordinale.

Mais il a été jugé, par un arrêt de section du Conseil d'Etat, que le seul fait de poursuivre l'exécution d'un contrat qui avait été l'objet d'un avis défavorable lors de sa communication à l'Ordre ne constitue pas pour un médecin une infraction de nature à justifier sa condamnation à une sanction disciplinaire (voir note 5).
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Notes
(1) Conseil d'Etat- 25 octobre 1974, Valton non publié.

(2) Conseil d'Etat- 9 juin 1967, Laudet- Recueil p.243.

(3) Conseil d'Etat- 13 mai 1987, Syndicat national professionnel des médecins du travail- Recueil Tables p.530. Voir aussi la consultation du Doyen Vedel dans le Bulletin de l'Ordre de mars 1971.

(4)Sous le régime de l'ancien article 77 la portée réglementaire des contrats-types passés entre les médecins et les institutions de droit privé, à la différence de ceux régissant les rapports des médecins entre eux relevant de l'ancien article 71 s'étendait à l'ensemble de leurs stipulations car aucune limitation aux seules clauses essentielles ne figurait dans le texte de l'article 77 qui s'écartait ainsi de celui de l' article 71, ainsi que l'a reconnu le Conseil d'Etat dans l'arrêt du 13 mai 1987. Cette différence de portée juridique entre ces deux catégories de contrats-types apparaissant sans justification, il y a été mis fin avec le texte du nouvel article 83 , où se trouve insérée la mention des clauses essentielles, ce qui constitue une heureuse simplification.

(5) Conseil d'Etat- 3 juillet 1970, N'Guyen Van Phi Long- Recueil p.460.